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Dare-dare plus de justice

• Vendredi 27/06/2008 • Version imprimable

Quelles que soient les opinions que l’on peut avoir sur monsieur Carette, il est une chose certaine : sa libération conditionnelle a fait l’objet d’un traitement dans les règles. Il y avait certaines conditions et elles ont été respectées. Aucune raison de le remettre en prison. C’est ce qu’a confirmé le tribunal d’application des peines.  Si ceux qui ont demandé son arrestation avaient lu son dossier, il n’aurait pas été emprisonné.[1] Ou n’était-ce comme le prétendent certains, un show médiatique, pour justifier d’autres arrestations ou pour faire peur aux braves citoyens.

Pourquoi diront les bien-pensants s’occuper d’un repris de justice même repenti ? D’abord, parce que c’est tout simplement la justice à laquelle tout le monde a droit. Ensuite, bien que bien-pensants, vous risquez de connaître la même situation. Peut-être pas la prison, mais certainement de vivre dans un état de droit dans lequel vos droits ne sont plus respectés ou sont carrément éludés.

Ce n’est pas autre chose que connaissent certains riverains de Bruxelles-National. Ils ne sont pas passés par la case prison (encore que certains…), mais ils voient les jugements en leur faveur, totalement ignorés par le pouvoir politique[2] Première instance, appel, cassation et reprécisions de la Cour d’appel, rien n’y fait. Le gouvernement s’en fout. Se lance dans des manœuvres dilatoires (après coup) pour ne pas l’appliquer en prétextant qu’il faut voir, étudier, que cela ne peut pas se faire comme cela. Et nous sommes prêts à mentir pour cela.[3] En d’autres termes, chers citoyens, vous avez peut-être un jugement en votre faveur, mais allez quand même vous faire f….  

Ce qui est sûr, c’est que certains politiques sont prêts à faire voter une loi pour entériner la situation condamnée par les tribunaux. Ainsi, plus de risque que des citoyens gagnent leur procès, parce que la loi, c’est la loi.

C’est dans le même sac que nous pourrions glisser les DAR (décret par autorisation régionale) du gouvernement wallon. « Ce décret est nécessaire pour contrer les recours systématiques au conseil d'Etat contre les chantiers de grande envergure. Le ministre a établi une liste de projets entrant dans le cadre de ce décret. Elle comprend les aéroports régionaux, les trois chaînons manquants fluviaux et routiers du réseau transeuropéen de transport (Cerexhe-Heuseux-Beaufays, écluse de Lanaye, contournement de Couvin), le réseau RER, les projets de trams et de bus à Charleroi, Mons, Namur et Liège, et la station d'épuration du Hain (Braine-le-Château) et le projet Fedex à La Hulpe ».[4]  Ces DAR me piquent au vif. Certes, il serait d’une certaine logique de considérer certains projets d’utilité publique. Leur permettre d’être réalisés rapidement et sans entrave pourrait ressortir d’une saine gestion. Le débat serait plus démocratique, jugent certains, puisque c’est le parlement wallon qui donnera son fiat. Nos élus wallons vont-ils donc se plonger dans les arcanes de ces dossiers complexes ou sera-ce un vote « le doigt sur la couture du pantalon ». L'objectif du DAR est d’éviter les phénomènes « Nimbiest » et les interminables recours de riverains devant le Conseil d'État. Tous les citoyens s’opposant à un projet viseraient donc simplement à protéger leur jardin et n’auraient pas de vue plus large que cela. Magnifique raccourci. Je m’interroge sur la validité d’une telle vision. Ainsi, à Grez-Doiceau, les opposants à l’installation d’une station d’épuration étaient-ils des « Nimbiest » ou n’avaient-ils pas une réelle et constructive réflexion : « Pourquoi mettre une station dans une réserve naturelle, alors que quelques centaines de mètres plus loin, il y a une friche industrielle mieux adaptée ? ». Les opposants à la liaison CHB à Liège sont-ils d’affreux égoïstes ? Ou mènent-ils une réflexion citoyenne sur l’utilité de dépenser autant d’argent pour un projet obsolète, conçu au temps où tout était encore dédié à la voiture ? Surtout que la Région wallonne peine à trouver deux francs six sous pour entretenir ses infrastructures routières et que ses chantiers antibruit sont à la traîne. Ce n’est pas parce que nous avons voté pour des gens que nous leur avons pour autant donné un blanc-seing pour tout. Nous n’avons pas aliéné notre capacité de réflexion. Et s’abstraire des critiques par ces procédés est-il finalement plus démocratique. De plus, si vous examinez bien la liste reprise plus haut, entre des projets de grandes infrastructures s’est glissé un vilain petit canard : FEDEX  « Le DAR est prévu pour les dossiers d'intérêt régional. Des aéroports, un RER, des écluses, ce sont des équipements d'utilité publique. Ce qui n'est pas le cas du projet FedEX, qui est un dossier portant sur une implantation commerciale, émanant du privé. Et Roland Rousseaux de s'interroger. Où sera l'intérêt régional de , puisqu'au risque de me répéter il n'y aura pas création d'emplois en Wallonie, mais bien délocalisation d'emplois flamands ? » lisait-on dans Vers l’Avenir. N’est-ce pas une légitime question ?

Passer d’un ancien activiste des CCC à l’implantation de semble un chemin tortueux, mais n’est-il pas naturel pour un démocrate de s’interroger sur ces choses. Notre état de droit est-il en bonne santé ? Les citoyens ont-ils une place dans cette société ?

« L'image ainsi communiquée aux peuples revient à leur dire que, quoi qu'ils fassent, ce qui est déjà décidé, sans eux, le restera. »[5] rapportaient des commentateurs au non irlandais pour le traité européen. Exemple magnifique que ce traité européen à ce point indigeste que le premier ministre irlandais, (comme peut-être la plupart des élus qui l’ont ratifié) ne l’avait pas lu. « Rendre le pacte politique qui est au fondement de la légitimité de l'exercice du pouvoir incompréhensible revient à vider de sa substance le suffrage universel et à revenir à un pouvoir qui se nourrit de l'arbitraire. Ceci exprime un profond mépris pour les peuples de la part de classes politiques qui se vivent de plus en plus comme des élites, comme une nouvelle aristocratie. Dès lors, il ne faut pas s'étonner que lorsque les peuples disposent encore du droit à l'expression démocratique, ils expriment leur mécontentement profond. » continuaient les mêmes commentateurs. 

Elite, le mot est lâché. Suffisance serait pour certains mieux approprié. J’ai souvenir d’un échevin qui se lamentait qu’aux réunions de village, les citoyens ne venaient que se plaindre de choses futiles, comme d’un trottoir défoncé ou d’un avaloir bouché… Qu’espérait-il ?  Simplement la gloire ?

Sic transit gloria mundi… mais entretemps, nombreux sont ceux qui en souffrent.

Denis MARION.