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Tout est dans tout, rien est partout

• Mardi 12/02/2008 • Version imprimable

Une chronique de Vincent Engel.

“La politique, quand elle est un art et un service, non point une exploitation, c’est une action pour un idéal à travers des réalités.” J’aime bien ressortir une petite phrase du Général (de Gaulle), de temps en temps, lui dont tant d’hommes politiques se disent l’héritier quand ils n’en sont que les pilleurs de tombe. D’accord, il disait aussi qu’il était un homme qui n’appartenait à personne et à tout le monde. Pour lui, c’était une manière de proclamer son indépendance et son dévouement. Cette déclaration, comme presque toutes les autres, peuvent se lire à l’envers aujourd’hui : la dépendance du politique par rapport à l’opinion, la “pipolisation”, et son art consommé d’exploiter une action réaliste à travers un idéal galvaudé, qui permet de ne se tenir engagé par aucune promesse et de décevoir tout le monde.
C’est peut-être qu’après avoir confié le soin de définir leur idéologie à des publicitaires et des pros de la com’, les politiques ont fait de leurs idées de simples produits de consommation, avec date de péremption rapide. Politiques d’annonces où les bilans servent à masquer ce qu’on n’a pas réalisé. On puise dans les sujets à la mode : une pincée d’écologie, de développement durable, quitte à faire le grand écart pour soutenir Francorchamp, Duferco ou le développement absurde d’un aéroport national bradé à une compagnie étrangère. Car si, pour le Général, le talent était un titre de responsabilité, le talent suprême aujourd’hui est d’éviter toute responsabilité.
Mais si la politique n’est qu’un produit de consommation, il ne faut pas s’étonner que les hommes et les femmes politiques deviennent des objets publicitaires. Tout ce qu’ils utilisent - la presse, les avions, les vacances - les utilisent en retour. Telle compagnie low cost, tel magazine, tel quotidien se paie en encart géant la tronche d’un ministre, d’un président, réponse économique du berger à la bergère.
Nos responsables politiques n’ont jamais été aussi présents, “proches du peuple”, que depuis qu’ils constatent leur impuissance à peser sur le cours des choses. Ils sont partout, nous dévoilent tout de leur vie privée, mais ne font rien, sinon se battre pour défendre leur pré carré - tandis que la précarité de leurs concitoyens augmente.
“Tout peut, un jour, arriver même qu’un acte conforme à l’honneur et à l’honnêteté apparaisse en fin de compte comme un bon placement politique”, reconnaissait encore de Gaulle. Encore un constat qu’il convient de retourner... Alors que, fondamentalement, “en notre temps, la seule querelle qui vaille est celle de l’homme. C’est l’homme qu’il s’agit de sauver, de faire vivre et de développer.”