Une chronique de Vincent Engel
L’annonce sans surprise des organisateurs du Dakar, concernant la reprise du rally et son déplacement en Amérique du Sud, aura un impact énorme sur la langue. Celle-ci, en effet, vient de s’enrichir d’un nouveau mot commun. Commun dans le sens le plus trivial du terme : vulgaire et banal.
En effet, à partir du moment où le “Dakar” peut se courir n’importe où sur la planète, pourvu qu’il y ait des déserts et des routes en mauvais état sur lesquelles les parents des enfants qu’on écrase sont assez pauvres et ignorants pour ne pas poursuivre les chauffards en justice, le mot peut être utilisé par chacun pour désigner autre chose qu’une course de voitures, de camions et de motos dans les déserts africains, avec comme point d’arrivée la capitale du... De quel pays encore ?
Je propose donc que les dictionnaires 2009 ajoutent cette entrée :
DAKAR, nom masculin : se dit d’une manifestation dont on affirme le caractère sportif, nécessitant des budgets indécents, permettant à des nantis décadents de venir parader devant les populations les plus pauvres, de polluer sans vergogne les plus beaux sites de la planète et de tuer des piétons et des bêtes maladroites en toute impunité, le tout avec la bénédiction du dieu Finance et la couverture de la déesse Média. Dérivé : DAKARISER, verbe tr. : pratiquer un dakar. Étymologie incertaine : certains évoquent une ville africaine, mais l’hypothèse la plus probable serait une évolution du mot “drakkar”, en référence aux pillages perpétrés jadis par les vikings, ancêtres des Vaatanen et autres champions de rally.
Attention, tous les aspects de la définition sont importants : quand Nicolas Sarkozy part en vacances sur un yacht à Malte, on ne pourra pas dire qu’il fait un dakar, ou qu’il dakarise : autour de lui, il n’y a que des yachts et des riches. Quant aux pervers pépères qui partent se soulager la bourse dans les paradis érotiques orientaux, il leur manque la couverture médiatique pour (dé)couvrir leurs frasques.
On le voit, il n’est pas simple de se faire un dakar. Peut-être pourrait-on accepter l’usage du mot pour ceux qui mettent douze mois pour mettre sur pied un gouvernement, au mépris des intérêts du pays et des volontés des électeurs. Les ingrédients principaux y sont : le mépris, l’arrogance, la prétention, la pollution causée par le manque de décision, les médias... On dira : personne n’en meurt. Cela reste à prouver : la caravane de la précarité n’a pas son pareil pour écraser ceux qui sont laissés pour compte, sur le bord de la route...
Reste à lancer la cérémonie annuel de remise des Dakar. Ni d’or, ni d’argent. Dakar noir de la pollution, dakar rouge de la honte. À mon avis, on aura vite du mal à départager les ex-aequo.
L’annonce sans surprise des organisateurs du Dakar, concernant la reprise du rally et son déplacement en Amérique du Sud, aura un impact énorme sur la langue. Celle-ci, en effet, vient de s’enrichir d’un nouveau mot commun. Commun dans le sens le plus trivial du terme : vulgaire et banal.
En effet, à partir du moment où le “Dakar” peut se courir n’importe où sur la planète, pourvu qu’il y ait des déserts et des routes en mauvais état sur lesquelles les parents des enfants qu’on écrase sont assez pauvres et ignorants pour ne pas poursuivre les chauffards en justice, le mot peut être utilisé par chacun pour désigner autre chose qu’une course de voitures, de camions et de motos dans les déserts africains, avec comme point d’arrivée la capitale du... De quel pays encore ?
Je propose donc que les dictionnaires 2009 ajoutent cette entrée :
DAKAR, nom masculin : se dit d’une manifestation dont on affirme le caractère sportif, nécessitant des budgets indécents, permettant à des nantis décadents de venir parader devant les populations les plus pauvres, de polluer sans vergogne les plus beaux sites de la planète et de tuer des piétons et des bêtes maladroites en toute impunité, le tout avec la bénédiction du dieu Finance et la couverture de la déesse Média. Dérivé : DAKARISER, verbe tr. : pratiquer un dakar. Étymologie incertaine : certains évoquent une ville africaine, mais l’hypothèse la plus probable serait une évolution du mot “drakkar”, en référence aux pillages perpétrés jadis par les vikings, ancêtres des Vaatanen et autres champions de rally.
Attention, tous les aspects de la définition sont importants : quand Nicolas Sarkozy part en vacances sur un yacht à Malte, on ne pourra pas dire qu’il fait un dakar, ou qu’il dakarise : autour de lui, il n’y a que des yachts et des riches. Quant aux pervers pépères qui partent se soulager la bourse dans les paradis érotiques orientaux, il leur manque la couverture médiatique pour (dé)couvrir leurs frasques.
On le voit, il n’est pas simple de se faire un dakar. Peut-être pourrait-on accepter l’usage du mot pour ceux qui mettent douze mois pour mettre sur pied un gouvernement, au mépris des intérêts du pays et des volontés des électeurs. Les ingrédients principaux y sont : le mépris, l’arrogance, la prétention, la pollution causée par le manque de décision, les médias... On dira : personne n’en meurt. Cela reste à prouver : la caravane de la précarité n’a pas son pareil pour écraser ceux qui sont laissés pour compte, sur le bord de la route...
Reste à lancer la cérémonie annuel de remise des Dakar. Ni d’or, ni d’argent. Dakar noir de la pollution, dakar rouge de la honte. À mon avis, on aura vite du mal à départager les ex-aequo.