Un texte de Jean-Marie DERMAGNE, avocat et bâtonnier du barreau de Dinant.
Parce qu'il n'a pas apaisé les esprits, Abou Jahjah est envoyé en prison. Les mouvements collectifs de protestation vont-ils connaître une aire de glaciation en Belgique ?
Lire La liberté de manifester est en péril
Extrait:
La loi de 1891 - la démocratie n'existait pas encore vraiment puisque le suffrage était censitaire, de sorte que les députés et sénateurs qui l'ont votée ne représentaient que moins d'1 pc de la population - avait clairement pour objet d'anesthésier les leaders et portes-paroles des mouvements ouvriers. A l'époque, la région de Charleroi venait de connaître les" émeutes de la faim". La Belgique traversait une crise économique grave. Le charbon produit ne trouvait plus d'acheteur. Les prix avaient flambé. A l'appui de son projet qui allait devenir loi, le ministre de la justice lança à la tribune de la Chambre : "Les derniers événements suffiraient à démontrer la nécessité absolue de fournir au pouvoir judiciaire le moyen d'atteindre les fauteurs de désordre, les prédicateurs d'anarchie, qui abusent des souffrances de l'ouvrier pour le pousser au désordre... L'appel au crime répété dans les harangues et meetings et dans les écrits répandus parmi le peuple affaiblit le respect de la loi et la confiance dans les autorités; il intimide les bons et enhardit les fauteurs de désordres; il arrête le mouvement des affaires et compromet la prospérité non seulement de l'industriel qui, sous le coup des menaces dont il est l'objet est obligé de fermer son atelier et son usine, mais aussi de l'ouvrier honnête que l'intimidation arrache au travail qui constitue sa seule ressource". Sans commentaire.