L'économie [politique] classique analyse et systématise certains modèles économiques et certaines conduites collectives régulières touchant la production la plus efficace et les échanges les plus avantageux, afin d'indiquer les meilleurs moyens d'aboutir à la prospérité dans un cadre social déterminé (dont la variabilité lui échappe bien souvent). Cette variabilité est moins souvent voulue qu’imposée. Et quand la volonté est là, ne découle-t-elle pas, parfois, souvent, de choix manipulés.
Notre mode de vie n’est pas négociable disent les Américains. Les Européens pourraient dire la même chose. Les classes aisées des pays émergents le trouvent séduisant. Il faut donc de la croissance pour que ce « bien-être » existe. Mais ce « bien-être » n’est finalement qu’une vue de l’esprit ou une accumulation de jouets. Et qu’est-ce d’autre que l’idéologie de la consommation.
Le débat sur les voitures de société en Belgique est exemplaire à cet égard. L’impôt est injuste et il faut l’éluder, légalement. Et le travail est une torture, il faut me motiver. Qu’y a-t-il de mieux qu’un véhicule et sa carte essence pour me donner du cœur à l’ouvrage et surtout assurer mon statut? Il importe peu que cela réduise l’assiette de la sécurité sociale ou de l’impôt, que cela constitue un privilège[1] financé par la collectivité[2]. Il importe peu que cela nécessite plus de parking, que cela engorge les routes et augmente la pollution, que cela conduise à des comportements aberrants favorisés par une absence de coût et qu’au final, la société ne s’y retrouve pas (que du contraire). D’aucuns pourront dire que d’autres avantages financés par la collectivité existent. Certes, mais ils ne deviendront des privilèges que s’ils ne présentent pas un gain pour la société, en termes par exemple de cohésion sociale, d’éducation, de santé publique ou de facture climatique. Ainsi, une prime à l’isolation favorisera d’une part, l’emploi local et d’autre part, une diminution de la facture climatique, ce qui n’est pas sans impact social.
Cette économie a donc modelé des modes de vie, lesquels ont renforcé la croyance en ses bienfaits réels ou futiles. N’avions-nous pas l’impression d’être comblés par le sort ? Mais l’âme est vendue et certains diables veulent leur dû. Des diables bien différents, concurrents.
Les marchés veulent maintenant de la rigueur « économique » et de la croissance. Ils ne sont pas à une contradiction près. S’il y a rigueur, il y a appauvrissement. S’il y a appauvrissement, il y aura diminution de la consommation, moteur de la croissance. Mais peut-être que ce que veulent les marchés, c’est simplement moins d’état, moins de protection, moins de politiques sociales et le moment s’y prête pour faire passer cela. Et certains y croient, convaincu que c’est le seul moyen de retrouver la cocagne.
La planète aussi se réveille. Et ses exigences sont fort différentes de celles de l’idéologie des marchés ou de la consommation. Elle n’a pas peur pour elle, mais pour les plus fragiles d’entre ses habitants, particulièrement les hommes. Des gens ont examiné ses demandes avec une rigueur « scientifique » cette fois. Ils en ont déduit que des modifications étaient nécessaires : moins de CO2, moins de gaspillage d’eau, de terres, de matière, Ce n’est pas de l’idéologie, ce sont des faits. Tout au plus pourrait-on dire qui ces gens voudraient que l’on repasse à l’art de gérer sagement une maison, un ménage, d'administrer un bien… qui était le sens premier de l’économie.
Mais on l’a vu à Durban, les pays, donc l’économie (ou inversement) s’assoient sur ces bons conseils. Dans ce débat d’ailleurs, si l’arrogance des plus riches est des plus détestables, elle ne cède en rien à l’hypocrisie de certains pays émergents, qui réclament le droit de polluer pour alimenter une croissance qui en définitive ne profite qu’à une élite. En d’autres termes, ils exigent à juste titre que les pays « riches » bouchent les trous dans la coque du bateau commun en s’arrogeant le droit d’y creuser d’autres voies d’eau aussi conséquentes.
Donnons la primauté aux faits, hic et nunc. Les faits exigent des modifications. Si l’idéologie n’aime pas cela, qu’elle se taise ou qu’elle se réforme. La seule contrainte est celle de la justice sociale et là, je suis d’accord, c’est du domaine des idées.
Entrepreneur sans but lucratif
[1] Ce privilège intéresse le salarié qui en profite, mais aussi et surtout l’employeur qui peut diminuer la masse salariale à financer.
[2] 4 milliards selon certains. Cela en fait des gares, des lignes de train ou de tram.
Il dénonce avec justesse l'aveuglement des marchés et des politiques face à ces enjeux cruciaux. Un appel à l'action et à la justice sociale s'impose. little things