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De retour en Absurdie.

• Mardi 03/06/2008 • Version imprimable

Dans ma dernière chronique, je vous avais promis, à votre corps défendant, les suites de mon voyage dans le sud. Mais voilà, Jim Harrisson, la bouffe et l’architecture attendront.  L’actualité » n’attend pas, surtout quand elle a la taille et le facies d’un Boeing 747 qui s’est cassé en trois sur la piste de décollage controversée 02/20.

Donc, un Boeing, plus très en forme selon certains, s’est plié, rétamé, à Zaventem, s’arrêtant à quelques mètres d’une ligne de chemin de fer fort fréquentée. Le nez de l’appareil, un peu ridicule, surplombait les voies. Depuis, cela débat, débat pour savoir quoi. Depuis, cela débat, débat pour raconter n’importe quoi. Enfin, certains.

Des faits.

Nous avons donc un avion lourdement chargé de kérosène et de courrier de l’armée américaine. 70 tonnes si j’ai bien compris. (A l’heure des GSM et des emails, je ne me doutais qu’il y a avait encore autant de madame de Sévigné parmi les GI’s. C’est bien que l’on se remette à l’épistolaire.)

Nous avons une piste qui sans être totalement dangereuse n’offre pas la sécurité maximale. Nous avons des procédures qui obligent à l’utiliser certains jours à certaines heures. Nous avons d’autres pistes mieux adaptées et qui permettent des décollages ou des atterrissages plus sûrs. Les pilotes peuvent en demander l’usage, mais après maintes tracasseries, ce qui ne les pousse pas à le faire.

Et nous avons eu un accident, sans blessé, sans mort, par chance.

Depuis des années, des organismes indépendants critiquent la manière de gérer le trafic à Zaventem. Depuis des années, les riverains s’inquiètent d’accident. Depuis des années, les autorités les rassurent ou ignorent leurs doléances. Cette semaine, un instructeur pilote énonçait un fait simple. Certes, utiliser la piste 02/20 n’est pas criminel, mais les marges de sécurité sont telles que multiplier les jours d’utilisation ne peut qu’augmenter les risques. C’est statistique. Le même incident sur les pistes principales n’aurait sans doute pas conduit au bris de l’appareil et certainement pas à proximité d’une liaison ferroviaire à fort trafic.

Pourtant, certains responsables politiques sont prêts à minimiser l’incident, à nier l’évidence, à profiter du délai de l’enquête pour attendre. J’en ai même entendu qui prétendaient que ne plus utiliser la piste incriminée conduirait à une diminution de la capacité de l’aéroport. D’abord, ce serait ignorer le principe de précaution pour des raisons économiques, mais en plus, c’est totalement faux. La configuration des pistes utilisée le jour de l’accident ne permet pas la capacité maximale de trafic. Tous ces mensonges n’ont-ils donc pour but de ne pas remettre leur politique en question, une politique qui favorise l’électorat de certains élus, niant aux autres citoyens leurs droits. Pour ceux qui l’avaient oublié, en réclamant des jours de repos pour le village de Diegem, pourtant historiquement en bout de pistes, Mr Anciaux s’était octroyé un week-end sans avion au-dessus de sa fermette de Neder-Over-Hembeek.

Toute cette politique avait pour prétexte officiel de répartir les nuisances. C’est ce que rappelait dernièrement un élu SP-A à ses élus de Herent, victimes de cette politique. C’est une question de justice, prétendait Landuyt en son temps, une justice où certains sont plus égaux que d’autres sans doute. Mais c’est une justice qui ne remet pas en cause le développement économique de l’aéroport.

Y-a-t’il eu réelle envie de créer un climat favorable (à défaut d’être environnemental) autour de cet aéroport ? Il n’y a eu aucune gestion urbanistique, aucun plan d’exposition au bruit, aucune expropriation, aucune limitation d’usage. Ce n’est que récemment que l’on envisage réellement de s’attaquer au bruit des avions. Mais surtout l’important est de ne pas remettre en question l’activité de cet aéroport. Que cela ait des conséquences communautaires n’est pas pour déplaire à quelques-uns, mais cela n’est le but premier.[1]

Ne demandons rien à l’aéroport, ne demandons rien aux compagnies, mais faisons payer le citoyen, avec sa santé d’abord, son environnement ensuite, son sang un jour. L’appareil aurait quelques mètres de plus, un train serait passé au même moment, qu’auraient dit les responsables ? Que le risque zéro n’existe pas ou qu’ils avaient tout fait pour s’en éloigner ?

Si on s’assied sur le principe de précaution ici, que ne feront pas là ? Jouera-t-on sur la sécurité nucléaire ou la dissémination des OGM ? Peut-être ? Sûrement ?
Alors je ne résiste pas vous offrir un extrait de la rubrique « Vent du Nord » publiée dans le Soir ce lundi :

« Dans sa chronique du Standaard, Bart Dobbelaere raille les éminences flamandes qui, pour prétendre aux honneurs des médias, devraient désormais se profiler dans les tranchées communautaires. ]...[La preuve par la dernière séance plénière du Parlement flamand : la Flandre souhaite planter des peupliers génétiquement modifiés, mais deux éminences fédérales, Laurette Onkelinx et Paul Magnette, socialistes francophones, s'y opposent. À la colère générale. Le ministre-président flamand a reconnu que l'affaire était sérieuse, qu'elle démontrait que quelque chose dysfonctionnait au gouvernement fédéral. " On se dispute autour de peupliers, soupire Bart Dobbelaere. La Flandre veut planter des arbres, le PS s'y oppose. Absurde. Le gouvernement flamand sait qu'il n'est pas question d'un complot de la Wallonie contre les biotechnologies flamandes. Y a-t-il vraiment quelqu'un qui voit encore la forêt que cachent les peupliers ? " »

Je suis de retour en Absurdie.

 

[1] Il est à rappeler, ce qu'oublient de nombreux politiques flamands, que la politique menée par monsieur Anciaux et ses successeurs en faveur du Noordrand a fait de nombreuses victimes certes francophones, mais aussi néerlandophones (à Bruxelles, dans l'Oostrand, mais aussi à l'est et au sud-est de l'aéroport. Il est aussi à noter que la Région flamande, prompte à défendre les riverains flamands de Bierset, ne tient pas à protéger ceux de Zaventem.