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Cela reste le bordel

• Jeudi 28/06/2012 • Version imprimable

Déboulonner la pub

Tous ces éléments révèlent que ce qui est en jeu s'avère beaucoup plus complexe que la simple liberté d'expression invoquée pour le publicitaire[1]. Or cette liberté-là ne va sans une autre liberté complémentaire de la première : la liberté de non-réception. Il s'agit de garantir à chaque citoyen le droit de choisir où et quand il souhaite accéder à de l'information publicitaire. Ceci pour lui permettre de se protéger de son influence ou simplement de se reposer de la surcharge d'information[2].

Calvin peut décider de changer de vie, de changer d’amis, de snober son vieux copain Hobbes, ce qui ne lui viendrait pas à l’idée. Il peut décider de couper la télévision, de ne pas écouter la radio, d’éviter les publications remplies de publicités, mais il va lui être de moins en moins aisé d’échapper à la réclame sur l’espace public. La liberté d’expression du publicitaire doit avoir des limites. Il est intolérable d’imposer ces messages commerciaux à ceux qui ne le désirent pas. Hobbes considère d’ailleurs que parler de liberté d’expression dans un discours mercantile n’est pas peut-être pas juridiquement abusif, mais philosophiquement limite. D’autant que ces discours ne sont pas sans effet sur la santé individuelle et collective[3].

Georges le Solitaire

Georges le Solitaire est mort. Hobbes le tigre, certes moins solitaire, en porte le deuil. Georges était une tortue géante centenaire. Son décès marque la fin de son espèce sur l’archipel équatorien des Galapagos. Une espèce disparaît malgré tous les efforts des scientifiques. Qu’en est-il donc pour tous les autres ? Tous ceux dont l’habitat disparaît, dont les conditions de vie se détériorent. Quelle chance ont-ils de survivre à une sixième extinction des espèces ?

Ne rien remettre en question.

La ministre française de l’écologie vient de le comprendre à ses dépens. Elle n’est pourtant pas la plus pointue en matière d’environnement, particulièrement en matière nucléaire. Mais elle avait décidé de réformer le code minier. Mal lui en a pris. Elle se retrouve maintenant au commerce extérieur. Il ne fait pas bon remettre en question le pouvoir de l’industrie minière. Laurence Parisot se félicitait devant l'assemblée permanente du Medef des interventions efficaces de son organisation auprès du gouvernement, pour relayer les doléances de Shell.[4]

OSS 117 : Rio ne répond plus

Alors pourquoi vouliez-vous que Rio soit une réussite ? 

"Nous espérions une conférence sur la vie, le futur de nos enfants. Nous avons eu une démonstration de bureaucratie onusienne", a déploré Lasse Gustavsson, directeur exécutif du WWF. "Les Etats sont venus ici les mains vides, sans argent et sans engagement, a ajouté Daniel Mittler pour Greenpeace. Ils accusent la crise pour expliquer qu'il n'y a pas d'argent pour le développement durable. On nous avait promis "l'Avenir que nous voulons" [nom du document final, ndlr], mais nous restons une machine polluante qui va cuire la planète, vider les océans et détruire les plantes tropicales." Daniel Mittler a regretté que le plan de sauvetage des océans, "la seule chose censée" survenue durant la conférence, ait été finalement torpillé par les Etats-Unis, le Canada, la Russie et le Venezuela[5].

Les seules choses qui sont prioritaires sont la consommation et la croissance, qui visent à l’enrichissement de certains, sous le couvert souvent abusif de l’emploi ou du développement.

"Les Etats sont venus à Rio vanter les emplois verts, la croissance verte, mais il n'y aura pas d'emplois sur une planète morte", a conclu Sharan Burrow, secrétaire générale de la confédération internationale des syndicats.

L’alliance du pouvoir et de la manipulation donne généralement des dictatures. Cette alliance peut être très subtile, inconsciente même. Qu’importe, tout est fait pour nous pousser à consommer, à nous faire oublier le reste et surtout que la planète risque de ne plus offrir l’environnement qui nous est nécessaire pour survivre, détruit par la rapacité humaine.

Le collectif «  ».


[1] Le 3 avril, huit personnes du collectif "les Déboulonneurs" comparaissaient à la chambre d'appel correctionnelle de Paris pour avoir barbouillé des panneaux publicitaires. Lors du procès, le réquisitoire du procureur a largement reposé sur l'argument d'une atteinte à la liberté d'expression des annonceurs.

[2] http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/06/26/la-publicite-peut-avoir-des-effets-nocifs-sur-la-societe_1724489_3232.html?xtmc=deboulonneur&xtcr=1

[3] Les estimations menées aux Etats-Unis montrent ainsi que l'obésité infantile pourrait être réduite de près d'un tiers en régulant mieux la publicité des produits alimentaires. Plus généralement, on sait maintenant que la dérégulation du système de récompense accompagne de nombreux troubles psychologiques et psychiatriques. Dans l'attente de travaux scientifiques évaluant l'effet de la publicité sur les populations à risque, il nous semble indispensable d'en appeler au principe de précaution pour réguler les messages commerciaux à destination de nos concitoyens les plus fragiles.