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Carte et Sens ou quart d'essence ou car décence.

Pauvre travailleur motorisé.

• Jeudi 21/08/2008 • Version imprimable

 « Le parc des voitures de société devrait être plus écologique dans quatre ans, au terme du cycle de leasing des véhicules achetés avant l’entrée en vigueur des nouvelles mesures destinées à réduire les émissions de CO2, auxquelles les entreprises semblent adhérer, selon une étude[…] Anticipant l’entrée en vigueur le 1er avril dernier du nouveau régime fiscal en matière d’émissions de CO2, quatre entreprises sur dix ont réorienté leur politique concernant les voitures de société ces trois dernières années. […] » rapportait ce mercredi une dépêche de Belga.

« Mais ces adaptations se font le plus souvent aux dépens du travailleur » déplorait le journaliste. En effet, en intégrant dans le budget mis à la disposition du travailleur la taxe CO², l’entreprise limite de facto le choix du travailleur. Plus la taxe est lourde, moins le collaborateur conserve a de quoi se payer certaines options « hautement nécessaire » comme un GPS.

« Les entreprises (46 %) limitent de plus en plus les possibilités de choix de leurs travailleurs. Les travailleurs peuvent uniquement choisir des modèles écologiques ou appartenant à une catégorie donnée d’émissions de CO2. Les entreprises optent de plus en plus pour les voitures diesel et les monovolumes limités et retirent les tout-terrains et les automatiques de leur parc de véhicules. » précise-t-on dans l’article, en rappelant qu’il faudra attendre environ quatre ans pour que ces mesures produisent un impact réellement visible, délai imputable à la durée du cycle de leasing.

En soi, tout cela pourrait être considéré comme une pas trop mauvaise nouvelle. Cependant, ma joie a ses limites. Le renouvellement d’une flotte permet d’avoir sur la route des véhicules plus propres. Encore faut-il avoir considéré tous les impacts sur le milieu, qui doivent englober les coûts environnementaux liés tant à la consommation qu’à la production du véhicule.[1] Nous restons ensuite dans des catégories de véhicule produisant encore plus de 140 g de CO² au kilomètre, ce qui n’est quand même pas le plus performant sur le marché. Ensuite, et là je n’ai pas vérifié si les arrêtés, en privilégiant les véhicules diesel, mais en n’imposant pas les filtres à particules, nous manquons la cible. De plus, cette orientation concerne moins de cinquante pour cent des entreprises. L’influence en est donc d’autant limitée.

De toute façon, cela ne remet pas en question le parc trop important de véhicules de société. Un travailleur bénéficiant d’un tel « avantage » ne le laisse pas au garage pour prendre le train. Et si d’aventure il le fait, il laisse généralement la voiture à disposition de quelqu’un d’autre qui en fera bien usage. Nous pouvons également considérer que cette utilisation sera d’autant moins immodérée qu’avec cette voiture est délivrée une carte essence que le travailleur utilisera pour des déplacements tant professionnels que privés, ne regardant pas un trajet de plus ou de moins.

Par contre, que ces relatives avancées se fassent au détriment du travailleur me laisse complètement froid. Elles ne se font pas pour une fois au détriment de la planète. D’ailleurs, je limiterais la mise à disposition de ces véhicules à ceux qui en ont réellement besoin, à des fonctions nécessitant de fréquents et longs déplacements et à défaut des les interdire pour les autres, je taxerais l’usage en nature plus fortement, en y englobant la carte essence.

Un délai de quatre ans pour que ces mesures aient un effet réel pourrait déjà être considéré comme long. Mais ce serait sans considérer que l’amélioration ne porterait que sur une partie seulement du « cheptel » et qu’elle n’aura pas été portée à son maximum, par exemple en-dessous des 120 ou 110 gr de CO² au kilomètre. Et de quatre ans en quatre ans, les progrès seront lents, très lents, surtout si la tendance au tout à la voiture perdure. Le même phénomène existe avec l’aviation où l’on nous conte toutes les améliorations à venir, mais où l’on compte à « coûts » de vingt ou trente ans.

Il est également dommage que les techniques modernes de vidéo conférence ou de télétravail ne soient pas plus mises en avant. Ce sont des moyens pour limiter les déplacements. Mais elles n’ont encore la faveur des entreprises, ni de leurs employés. On me rapportait il y a quelques temps (mais peut-être l’ai-je déjà dit) qu’une secrétaire dans une banque préférait réserver un billet d’avion pour sa patronne, plutôt que de recourir à une vidéo conférence à laquelle elle ne comprenait rien.

Bien entendu, après cela, on pourra dire, comme un collègue me l’a asséné ce midi que je n’aime pas les voitures. Avant tout, je n’aime pas l’usage irraisonné des moyens de transport polluants.

Denis MARION.