Avec mes excuses anticipées à P., motard si peu repenti et aux patrouilleurs de T.S.
Cela déconne au Touring Club. Ils se sont donnés comme objectifs de lâcher les fauves ou quoi. Il faut sans doute que les automobilistes cravachent leurs chevaux vapeurs, que les frustrés de la route puissent « jouir » de la puissance de leur moteur à défaut d’autres choses.
Touring plaide pour le 130 km/h sur autoroute et lit-on dans la presse « Selon l’association, diminuer le nombre de victimes sur les routes ne peut être atteint seulement en augmentant les contrôles et en réprimant davantage. » Purée de bois, sont-ils sains d’esprit dans cette association? Je commence à me demander si je ne vais pas résilier mon affiliation à Touring Secours.
A croire que certains, et d’ailleurs pas seulement chez Touring, vivent sur une autre planète, où le pétrole est encore bon marché, le réchauffement n’est pas encore climatique et la circulation est si peu dense que la malchance de faucher un piéton est similaire à celle de gagner le gros lot trois fois de suite.
Le lien entre vitesse et consommation est connu de tous. Et qui dit consommation, dit pollution. Par exemple, la première chose que l’on fait en présence de pics d’ozone est d’imposer une vitesse plus basse aux véhicules. Augmenter de dix kilomètres/heure la vitesse maximale ne sera pas sans conséquence sur notre production de CO² et autres sympathiques gaz, surtout que ce maximum reste encore trop souvent théorique. Veulent-ils saboter le protocole de Kyoto ?
Le lien entre vitesse et sécurité a été maintes fois mis en évidence. Des études ont démontré qu’en France, l’instauration des limitations de vitesse dans les années septante avait une influence directe sur le nombre de tués et de blessés. Veulent-ils exploser les dépenses de sécurité sociale ?
Le lien entre vitesse et bruit est certes moins connu mais indéniable. Les riverains d’autoroutes qui attendent encore que les chantiers d’insonorisation soient financés apprécieront la sollicitude du Touring Club.
Apparemment, pour les représentants de l’association, ce sont des arguments qui ne sont pas assez bien pensés pour les convaincre de conserver voire diminuer la limitation actuelle sur autoroute.
Il est également ahurissant de croire la répression inutile.[1] Ce n’est pas que je sois un partisan d’un état policier, mais je ne suis pas naïf au point de croire que la vitesse est régulée par la simple bonne volonté des usagers de la route. Il y a encore trop de gens, des hommes particulièrement, mais de plus en plus de femmes aussi, qui croient que la voiture est un signe d’intelligence, de puissance et de réussite. Leur cerveau a été bouffé depuis des lustres par la publicité automobile. La hausse des prix des carburants ne semble même pas avoir d’influence sur le pied lourd. Certes, beaucoup d’automobilistes ont une voiture en leasing et une carte d’essence, ceux-là, je pourrais concevoir qu’ils tirent dedans, mais les autres. Le dispositif répressif est donc encore de mise, n’en déplaise aux tenants de la liberté automobilistique. Mais ils ont raison pour une part. Cela ne suffira pas. Il faut une réelle révolution des mentalités.
Quand vous vous circulez à vélo sur une étroite route de campagne, vous seriez en droit d’attendre un peu de respect de l’automobiliste que vous croisez, qu’il ralentisse par exemple. Je t’en fiche. Bouffe sa poussière et ramasse-toi dans le champ. Quand vous êtes suivi par une troupe d’excités casqués dans un village, vous pourriez penser que ces papys (ce sont de plus en plus souvent des papys, vu le prix des bécanes et la consommation de leur moteur) auront à cœur de respecter la limitation. Rien à cirer, la liberté avant tout, la mienne surtout. Même certains Vététistes qui quittent leur BMW le week-end pour se saloper dans les chemins se comportent comme des petits c… en chopant les piétons. C’est cette révolution-là qui est nécessaire. L’égo démesuré et la vitesse ne font pas bon ménage avec une vie saine et socialement respectueuse.
Supprimons les « gros bacs » inutiles. Imposons une limitation encore plus drastique, cent à l’heure par exemple. Apprenons à ces gens sans imagination qu’il y a une vie sans la vitesse, voire sans la voiture. Qu’ils fassent l’amour par exemple, éventuellement sur la banquette arrière s’ils sont à ce point nostalgique.
Denis MARION.
Tiens, en septembre, c’est la semaine de la mobilité et l’association dans laquelle je milite tient un stand à Grez-Doiceau le 21 septembre. Venez nous voir.
[1] Des infrastructures bien pensées et en bon état peuvent certes diminuer la mortalité et les accidents sur les routes, mais ce ne sont pas elles qui modifieront les comportements.