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A chacun son conservatisme.

• Mercredi 16/06/2010 • Version imprimable

(J’ai commencé cette chronique lundi 14 juin et l’ai nourrie au fil des jours…)

La Belgique s’est enfoncée encore un plus dans le conservatisme (mâtiné d’indépendantisme) ces dernières élections. Elle suit en cela ce qui se passe ailleurs en Europe, encore récemment avec les Pays-Bas et la Grande-Bretagne, faisant, par certains côtés, de notre (in)continent une citadelle de peur et d’angoisse.

N’est-il pas légitime de s’inquiéter de son avenir, de celui de ses enfants ? N’est-il compréhensible que nous voulions conserver tout ce que nous avons sans que d’autres « qui n’ont rien fait pour » ne viennent nous le piquer ?  C’est parfaitement normal pour l’individu qui a autant de conscience qu’une pierre, qui pense à un avenir à long terme avec des réflexions à court terme, qui manipule le passé pour justifier son présent, niant autant la responsabilité de ses pères que la sienne. Un certain portrait de l’Européen… ou plus simplement du nanti face aux plus démunis.

Je n’ai personnellement pas un avis tranché sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ou sur la volonté d’indépendance qui pourrait en découler. D’abord, faudrait-il s’entendre sur ce qu’est un peuple, particulièrement en Belgique, où des chantres du mouvement flamand portent un nom francophone et des leaders wallons, un patronyme flamand. Ensuite, parce les volontés d’indépendance sont plus liées en Europe à des considérations pécuniaires que réellement identitaires ou à qu’à un rejet de la sujétion.

Ainsi donc, le nord du pays s’est plongé dans un conservatisme de droite. Mais le sud est resté progressiste, si tant que cela veuille dire encore quelque chose. Mais il est une chose que les partis gagnants de ces élections ont en commun : la tiédeur face aux questions environnementales. Cela est clair pour la NV-A qui n’a pas repris dans son discours l’intérêt que pouvait avoir la VU pour l’environnement. Le parcours politique et professionnel de son leader ne le pousse pas à considérer cela comme une priorité. De même au PS, il existe une certaine condescendance pour ces matières. Il y a déjà la manière peu élégante avec laquelle un (ancien) ponte du parti, Mr Eerdekens, considère l’écologie. Mais cette caricature n’est peut-être que l’expression d’un sentiment finalement commun dans son parti.

Pierre Titeux dans sa chronique Qui avale une noix de coco doit avoir confiance en son anus... en disait un mot.

Le vendredi 4 juin, la Coalition Climat – plateforme regroupant plus de 80 organisations de la société civile (syndicats ; ONG Nord/Sud, de développement, environnementales... ; mouvements de jeunesse ; etc.) censées représenter un million de personnes – a souhaité « faire entrer le climat dans la campagne » en conviant les présidents de partis à venir « voter pour le climat » sur les marches de la Bourse de Bruxelles, lieu symbolique d’un système au coeur de nos maux. Les partis envoyèrent tous une délégation plus ou moins prestigieuse mais ce qui semble avoir frappé les politiques, plus que les revendications sur lesquelles ils étaient invités à se prononcer, c’est la maigreur de la mobilisation autour de l’événement, ce que le Ministre Magnette venu représenter le PS ne manqua pas de relever avec une pointe d’ironie en disant espérer « que vous serez plus nombreux une prochaine fois ».

Cette ironie ne cache-t-elle finalement ce malaise qu’a le PS, mais pas seulement lui, tous les politiques, je pense, même certains Ecolos, ce malaise face aux défis liés à la dégradation de l’environnement. Nombre d’entre eux sont convaincus que cela constitue un des risques majeurs des deux prochaines décennies. Mais se sentent-ils capables d’expliquer à leurs concitoyens la nécessité de modifier leurs habitudes de vie ? J’en doute. Pourtant, parce que je ne peux qu’être enclin à suivre Pierre Titeux quand il dit que « l’environnement constitue une préoccupation mineure pour une très grande majorité du public », ce serait leur rôle d’expliquer ces enjeux.  Ils le font très bien pour nous expliquer le besoin de rigueur financière, d’allongement de la durée de travail. Mais que les gens crèvent en travaillant soit, mais que l’on ne vienne pas leur enlever leurs paradis artificiels.

On va donc s’accorder à réformer, à modifier nos structures pour simplement continuer dans la même voie sans issue.

Je ne sais pas si c’est comme cela que Daniel Cohn-Bendit entendait le conservatisme des élections en Belgique, mais c’est en tous les cas comme cela que je le vois.

 
Denis Marion
Entrepreneur sans but lucratif.
 

PS. A choisir, Pierre, je préférais que tu t’exhibes nu sur la scène du concours Reine Elizabeth plutôt que immoler devant le 16 rue de Loi. A force peut-être que le message finirait par passer.[1]

 

[1] Dans la même chronique citée plus haut.