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Voler nuit gravement à la santé.

Une mention obligatoire sur les billets d’avion. (C’est de la fiction ?)

• Mercredi 03/01/2007 • Version imprimable

S'interroger sur la déontologie des journalistes ne doit pas consister à s'épuiser en considérations sur une émission atypique dont le principe et les modalités sont d'ailleurs dépiautés ad nauseam depuis une semaine par la Belgique. C'est plutôt de faire en sorte que les journalistes se grattent là ou ça les démange tous les jours ou presque : dans les dérives, dérapages et approximations de leur travail banal, celui de leurs journaux parlés ou télévisés quotidiens, celui de leurs articles journaliers, parfois biaisés, hiérarchisés, cadrés, découpés et montés de manière telle que la réalité est subrepticement altérée par une idéologie sournoise ou par les verrous d'a priori plus ou moins conscients. Cette déontologie-là vaut en effet qu'on tente de s'en préoccuper, de la définir et de la défendre. (1)

Zut, diront d’aucuns et les autres aussi, il revient encore avec ce canular. La page est tournée, les négociations amorcées et autres billevesées…

Non, je ne reviens pas sur ce canular de fin d’année qui a dû perturber maints claviers et assécher bien des stylos, mais ces quelques lignes d’Yvon Toussaint me permettent de revenir sur ce que j’avais appelé dans ma précédente chronique un continuum de l’information lato sensu. Il vous fait passer d’un sujet très sérieux « l’influence du réchauffement climatique sur l’enneigement dans les Alpes » à une publicité sur les avantages de l’avion pour rejoindre votre station de ski. (2)  Et bien, il y a quelques jours à peine à la télévision, j’ai vu mieux dans le mélange des genres.  Un journaliste nous expliquait avec force conviction que le temps se détraquait, que la neige ne tombait plus où elle devait tomber, pas plus qu’à côté.  Et puis, avec un ton consolateur, il vous invitait, si vous ne deviez plus avoir de plaisirs de neige, d’aller chercher le soleil dans une l’une ou l’autre rôtisseries exotiques. Le reportage se terminait sur une affiche vantant les bienfaits du soleil par avion. (Peut-être était-ce au second degré?)

Dans une autre émission de grande écoute,  une chroniqueuse rappelait que l’avion était source de polluants tant sonores que chimiques, mais en concluant quand même son intervention par un « Personne n’est contre l’avion » que je traduis, abusivement, par un « Malgré ces quelques désagréments, Personne ne peut être contre ces magnifiques oiseaux blancs qui dispensent joie et sérénité ».
Comment aborder une matière aussi complexe que celle des nuisances aériennes sans se heurter à des clichés du genre « Vacances, j’oublie tout » et « Jet set, je veux en être ». Je ne veux pas faire porter le chapeau à qui que ce soit, encore moins aux journalistes, les deux exemples repris ci-dessus n’étant pas emblématiques. Il n’empêche, à force de devoir traiter des sujets en quelques secondes,  il est difficile de donner une idée exacte de la situation à des spectateurs ou des auditeurs qui baignent dans les idées reçues « Tous les avions sont beaux, tous les avions sont gentils ».

Les journalistes de la presse écrite ont certes plus de place pour traiter le sujet, mais là aussi, les priorités de l’actualité et la complexité du domaine sont parmi les obstacles à franchir. 
On parle toujours du problème des vols nocturnes à Zaventem alors qu’Anciaux l’a étendu, il y plus de mille jours, aux vols diurnes.  On parle toujours de la création d’emplois par un aéroport, mais jamais des destructions de jobs. On parle toujours des nuisances sonores, parfois sur un mode moqueur, mais rarement des autres polluants qui arrosent toute une région.

Pire, à chaque départ en vacances, les chaines de télévision font faire un  tour à Bierset, Charleroi ou Zaventem pour célébrer  le sacrifice du silence et de l’air, avec toujours au moins un ahuri pour affirmer « On a besoin de soleil, avec tout ce stress ». Lors des derniers départs, parce que l’aéroport de Londres était bloqué par le brouillard, on a eu droit aux larmes des pauvres veaux qui attendaient leur avion. (Certes, je n’apprécierais pas de me retrouver dans la même situation, mais de là à en faire un reportage).
Il est donc temps de présenter l’avion pour ce qu’il est devenu : une plaie.
Tout voyage en avion ruine vos efforts quotidiens pour diminuer votre empreinte écologique.  Alors, vous pensez ! Avec vos un ou deux minitrips en low cost sur l’année, vous prenez directement des kilos de CO², lesquels s’ils n’augmentent pas votre tour de taille, augmentent le réchauffement de notre planète.
Savez-vous qu’une famille peu encline à respecter l’environnement dans sa consommation, mais qui prend ses vacances à La Panne a une empreinte moindre que celle d’une famille de pointus écolos qui part en avion se ressourcer à l’autre bout du monde ? Connaissez-vous le nombre d’éoliennes qu’il faut pour compenser un vol en avion ? (3) Savez-vous que des  langoustines pêchées en Mer d’Ecosse font 27.000 bornes pour se faire dépiauter en Thaïlande (en laissant 120 chômeurs sur les plages grises d’Ecosse), soit un 1,5 kg et demi de CO² par kilo de langoustines ? (4) Connaissez-vous le coût environnemental du transport de haricots frais « bios » du Kenya ? (5) Alors la prochaine fois que vous verrez un reportage sur les voyageurs bloqués à Londres, vous aurez une pensée pour les ours blancs et quand vous achèterez des légumes, vous les prendrez de saison (et du coin). Ce serait déjà une bonne résolution pour 2007.

Et aussi, à l’heure où l’on fait la chasse aux fumeurs, je verrais très bien une mention obligatoire sur les billets d’avion : « Voyager en avion nuit gravement à la santé »

Avec mes meilleurs vœux.

(1)    Yvon  Toussaint  Journaliste et écrivain Ancien directeur-rédacteur en chef
du Soir
(2)   http://www.vincent-engel.com/article.php3?id_article=431)  
(3il faut savoir qu’un simple avion de ligne faisant quotidiennement l’aller-retour entre Londres et Miami produit l’équivalent de 520 000 tonnes de dioxyde de carbone par an, annulant le bénéfice de trois immenses parcs éoliens.
http://tropdebruit.viabloga.com/news/energie-polemique-autour-d-un-parc-d-eoliennes-geant
(4)   http://www.lalibre.be/article.phtml?id=11&subid=118&art_id=321009
(5)   Lisez à ce sujet cette excellente fiche d’Ecoconso. : http://www.ecoconso.be/article28.html



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Commentaires

Lien croisé par Anonyme le Mercredi 11/04/2007 à 21:37

TBBW - Bientôt un message "Prendre l'avion nuit à l'environnement" ? : "comparaison avec d'autres modes de transport comme le train. Source Reuters. Voir également ceci Stop à la Pub. ou ceci Voler nuit gravement à la santé.L'article dans le JDLE. "