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Chroniques d’été : aux petits industrieux.

• Lundi 02/08/2010 • Version imprimable

Une série de chroniques construites sur des propos recueillis ces derniers mois.
Le trottoir est encore un endroit où l’on cause, parfois philosophiquement, des grains à venir et des orages d’hier.

« Hé bien, dit le maigre, je ne suis guère optimiste. Je viens de lire un article qui dit que BP n’est pas la seule pomme pourrie. Ho, ho, répond le gros, pas d’anti-industrie primaire. Cela a été certainement écrit dans un journal écolo.
- Pas du tout, répond le premier, c’est dans un journal financier. Et c’est un professeur de droit qui causait[1].
- Mais vous ne pouvez pas mettre tout le monde dans le même panier.
- Ce professeur disait qu’après la catastrophe de l’Exxon Valdez, La commission d’enquête avait déterminé qu’une culture de «complaisance, négligence et corruption» au sein d’Alyeska avait créé les conditions de l’accident et que rien n’a changé en 20 ans.
- Ouais, facile. Ce n’est pas parce que BP a failli que tous les industriels font de même. De toute façon, t’es bien content d’avoir du carburant pour ta bagnole.
- Peut-être, mais quand même pas à n’importe quel prix.
- De toute façon, on roulera tous bientôt en voiture électrique.
- Je ne sais pas. Il faudra bien produire de l’électricité. Et je ne pense pas que les énergies renouvelables couvriront les besoins.
- Bah, il y a bien le nucléaire. Il y a de l’uranium encore pour des siècles.
- Et des crasses à traiter pour des millénaires.
- Il y aura des progrès techniques.
- Ne me fais pas rire. Tu connais la centrale de Brennilis ?[2]
- C’est quoi. Un truc en Russie?
- Non, une centrale en plein cœur du pays d’Astérix. Elle doit être démantelée et le chantier traîne depuis 1985. Et d’après le Canard Enchainé, cela durera encore et coûtera un pont. Ils ne savent pas trop commenta faire finalement.
- Bah, ils provisionnent des sommes pour cela.
- Placées en bourse sans doute[3]. Fondront comme neige au soleil.
- Il faut avoir plus confiance. Tous ces gens sont des hommes et des femmes responsables qui essayent de rendre notre société plus agréable.
- Et les sables bitumeux pour récupérer le pétrole, c’est bon pour les rivières peut-être ?
- Tu vois tout en noir. Il y a un boom économique en Ontario.
- Oui et des territoires foutus pour des siècles pour un résultat énergétique quasi nul.
- Bon, on ne fait pas d’omelettes sans casser d’œufs. Le monde n’est parfait.
- Peut-être, mais ils ne font pas grand-chose pour y tendre. Tiens, les nanotechnologies…
- Tu ne vas pas commencer avec ça. Quoi ? C’est aussi un truc dangereux pour l’environnement, peut-être ?
- Cela peut être utile pour la médecine, mais maintenant on en fout partout, dans les produits de beauté, les fringues, des tonnes de ces nanotubes. Même pour faire des puces RYFD microscopiques qui permettront de te suivre à la trace.
- Allez, ne sois pas parano. On dirait que tu rejettes tout progrès.
- Non, mais quand je lis que le nanotube sera l’amiante du vingt-et-un nième siècle, je trouve normal de m’inquiéter. Cela ne te fait rien.
- Pas de catastrophisme. Sinon, on arrête de vivre.
- T’inquiète. Au train où cela va, le débat sera vite clos.

Pendant ce temps-là, en les écoutant, je regardais une jolie fille passer avec son bébé.

Propos recueilli par Denis MARION
Entrepreneur sans but lucratif.
 
 
 

[1] Zygmunt Plater, professeur de droit de l’environnement au Boston College, a présidé l’enquête légale suite au naufrage du pétrolier Exxon Valdez en Alaska en 1989. Il ne mâche pas ses mots concernant la catastrophe de Deepwater Horizon... et l’ensemble de l’industrie pétrolière.